Grand bien vous fasse ! France Inter, Mardi 20 juin 2023
Bilan, espoir, perspective… La crise de la quarantaine, de la cinquantaine nous confronte à nous même, à notre rapport aux autres, à notre parcours de vie, à nos projets et à notre finitude.
Le temps écoulé, le temps qu’il reste, et cette sensation d’être au milieu du gué quand survient la certitude d’être arrivé au mitan de sa vie.
- Quels sont les symptômes de cette crise du milieu de la vie ?
- Vivons-nous tous cette période de la même manière ?
- Les hommes et les femmes réagissent-ils de la même façon ?
- Quelles sont les signes révélateurs de cette crise ?
- Comment bien vivre cette période de transition qui s’apparente parfois à une crise d’adolescence ?
Éléments de réponse avec nos invités.
On doit cette notion de crise du milieu de la vie au psychanalyste canadien Eliott Jaques. C’était en 1965. Le psychiatre Lucien Millet a développé ce concept en France. Il était le père de la psychiatre Françoise Millet Bartoli, invitée de l’émission. Elle définit ce moment : « C’est une crise qui existe vraiment, même si elle ne prend pas forcément un aspect dramatique. La cinquantaine résonne fort. C’est une période de bilan incontournable, qui peut s’accompagner, dans certains cas d’un sentiment pas forcément d’échec, mais d’une impression d’avoir raté quelque chose. Elle pose la question du sens de la vie de manière un peu douloureuse. »
Prendre conscience de sa propre mortalité
Selon Eliott Jaques, cette crise psychologique peut survenir quand on a pris conscience de sa mortalité. Françoise Millet Bartoli confirme que c’est souvent un deuil qui déclenche ce sentiment : « Ce peut-être la mort d’un de ses parents, ou le fait de perdre un ami de sa génération. Ces événements nous rappellent que nous sommes mortels, que l’existence a une finitude et que le temps qui reste est peut-être compté. »
Une crise assez commune
Si tout le monde ne fait pas de crise, ce passage est assez fréquent. Et, explique Françoise Millet Bartoli, « Elle est bruyante, souvent chez les personnes qui n’ont pas vraiment fait de crise d’adolescence, qui ont eu une vie plutôt conforme à ce qu’on attendait d’eux, une adolescence plutôt sage. À la cinquantaine, ils prennent conscience de ce qu’ils n’ont pas exploré jusque-là, ils étouffent et deviennent des adolescents à retardement. Ils adoptent parfois des comportements à risque, se lancent dans de multiples projets, avec un besoin de sortir, de séduire, de faire ce qu’ils veulent. »
Prendre conscience de sa propre mortalité
Selon Eliott Jaques, cette crise psychologique peut survenir quand on a pris conscience de sa mortalité. Françoise Millet Bartoli confirme que c’est souvent un deuil qui déclenche ce sentiment : « Ce peut-être la mort d’un de ses parents, ou le fait de perdre un ami de sa génération. Ces événements nous rappellent que nous sommes mortels, que l’existence a une finitude et que le temps qui reste est peut-être compté. »
Une crise assez commune
Si tout le monde ne fait pas de crise, ce passage est assez fréquent. Et, explique Françoise Millet Bartoli, « Elle est bruyante, souvent chez les personnes qui n’ont pas vraiment fait de crise d’adolescence, qui ont eu une vie plutôt conforme à ce qu’on attendait d’eux, une adolescence plutôt sage. À la cinquantaine, ils prennent conscience de ce qu’ils n’ont pas exploré jusque-là, ils étouffent et deviennent des adolescents à retardement. Ils adoptent parfois des comportements à risque, se lancent dans de multiples projets, avec un besoin de sortir, de séduire, de faire ce qu’ils veulent. »
Le temps des trahisons nécessaires
Pour la philosophe Nicole Prieur : « C’est le moment d’oser affronter son angoisse de mort. Et où on s’imagine sur son lit de mort et on espère ne pas avoir de regret. 50 ans est vraiment l’âge où on a suffisamment d’énergie pour se défaire de nos loyautés sclérosantes pour se poser la question de ce qu’on n’a pas réussi à faire. On peut s’interroger : « Qu’est-ce que je ne me suis pas autorisé ? À quelle injonction j’obéis encore ? Celle de mon père ? De ma mère ? C’est vraiment une occasion qui peut être angoissante. Mais à cet âge-là, on a vraiment énormément de cartes dans les mains. »
Un moment qui n’est pas une fatalité
Tout n’est pas négatif dans la cinquantaine. Pour Juliette Arnaud, co-animatrice de l’émission C’est encore nous sur France Inter : « Je sais que j’ai un nouveau jeu que je n’ai pas encore lu. Je vais le lire et je ne suis pas à l’abri d’avoir de très bonnes cartes. Et quand mon médecin généraliste m’a parlé de ménopause, il a expliqué qu’en médecine chinoise, on parle de cette période comme d’un deuxième printemps. Et j’ai enterré mes regrets, comme celui de ne pas avoir d’enfant, assez profondément. » Et Eva Roque, chroniqueuse de Capture d’écran sur France Inter : « Je crois que c’est une pulsion de vie, sans doute parce que j’ai fait des crises à 30 ans et à 40 ans. Ce qui m’a permis d’évacuer certains dossiers ! »
Françoise Millet-Bartoli ajoute : « A la cinquantaine, le personnage façonné par notre éducation se défait pour arriver à la vraie personne. On enlève le masque et c’est un moment où on s’autorise à être soi-même, à affirmer ses désirs, où l’on se détache du regard de l’autre, on assume davantage ses erreurs, ses défauts… On décide d’arrêter d’être conforme à ce qu’on attend de nous. En ça, c’est la possibilité d’ouverture à de nouveaux projets. »
Pour la philosophe Nicole Prieur : « C’est le moment d’oser affronter son angoisse de mort. Et où on s’imagine sur son lit de mort et on espère ne pas avoir de regret. 50 ans est vraiment l’âge où on a suffisamment d’énergie pour se défaire de nos loyautés sclérosantes pour se poser la question de ce qu’on n’a pas réussi à faire. On peut s’interroger : « Qu’est-ce que je ne me suis pas autorisé ? À quelle injonction j’obéis encore ? Celle de mon père ? De ma mère ? C’est vraiment une occasion qui peut être angoissante. Mais à cet âge-là, on a vraiment énormément de cartes dans les mains. »
Un moment qui n’est pas une fatalité
Tout n’est pas négatif dans la cinquantaine. Pour Juliette Arnaud, co-animatrice de l’émission C’est encore nous sur France Inter : « Je sais que j’ai un nouveau jeu que je n’ai pas encore lu. Je vais le lire et je ne suis pas à l’abri d’avoir de très bonnes cartes. Et quand mon médecin généraliste m’a parlé de ménopause, il a expliqué qu’en médecine chinoise, on parle de cette période comme d’un deuxième printemps. Et j’ai enterré mes regrets, comme celui de ne pas avoir d’enfant, assez profondément. » Et Eva Roque, chroniqueuse de Capture d’écran sur France Inter : « Je crois que c’est une pulsion de vie, sans doute parce que j’ai fait des crises à 30 ans et à 40 ans. Ce qui m’a permis d’évacuer certains dossiers ! »
Françoise Millet-Bartoli ajoute : « A la cinquantaine, le personnage façonné par notre éducation se défait pour arriver à la vraie personne. On enlève le masque et c’est un moment où on s’autorise à être soi-même, à affirmer ses désirs, où l’on se détache du regard de l’autre, on assume davantage ses erreurs, ses défauts… On décide d’arrêter d’être conforme à ce qu’on attend de nous. En ça, c’est la possibilité d’ouverture à de nouveaux projets. »
Une solution ? L’acceptation de cette mue
Françoise Millet Bartoli : « Souvent, cette période est vécue comme une mue. On perd ses cheveux noirs, le lisse de notre peau, la possibilité d’avoir un enfant… Mais la perte ouvre sur de nouveaux possibles. Et plus on accepte de perdre, plus on arrivera à s’ouvrir à de nouvelles possibilités et à découvrir en nous, des ressources que nous n’avions pas vues, parce que justement, on était accrochés à nos cheveux noirs. On va vers une forme d’humilité, de simplicité et une forme de dépouillement. On accepte peut-être plus le réel et on est capable de mieux le savourer. »
Dédramatiser et renouer avec des envies passées
Françoise Millet Bartoli conseille de dédramatiser : « Ce n’est pas facile. C’est même difficile de mettre de l’humour là-dedans. Mais on peut essayer. On peut aussi retrouver en soi des aspirations pas complètement explorées. Je pense en particulier à, par exemple, reprendre un instrument de musique qu’on avait abandonné parce qu’on n’avait pas eu le temps. Mais ça peut être aussi écrire. Le but, ce n’est pas d’être un héros en musique ou en écriture… Mais de retrouver et enrichir une des aspirations qu’on avait depuis longtemps et qu’on avait envie de redévelopper. »
Juliette Arnaud conclue : « Quand je sens que je vacille, je me lève juste très tôt, je mets une paire de baskets et où que je sois, je cherche l’endroit où je vais pouvoir voir l’aube arriver. Ça ne coûte pas cher et franchement, ça relève intérieurement, spirituellement. »
Avec :
Françoise Millet Bartoli : « Souvent, cette période est vécue comme une mue. On perd ses cheveux noirs, le lisse de notre peau, la possibilité d’avoir un enfant… Mais la perte ouvre sur de nouveaux possibles. Et plus on accepte de perdre, plus on arrivera à s’ouvrir à de nouvelles possibilités et à découvrir en nous, des ressources que nous n’avions pas vues, parce que justement, on était accrochés à nos cheveux noirs. On va vers une forme d’humilité, de simplicité et une forme de dépouillement. On accepte peut-être plus le réel et on est capable de mieux le savourer. »
Dédramatiser et renouer avec des envies passées
Françoise Millet Bartoli conseille de dédramatiser : « Ce n’est pas facile. C’est même difficile de mettre de l’humour là-dedans. Mais on peut essayer. On peut aussi retrouver en soi des aspirations pas complètement explorées. Je pense en particulier à, par exemple, reprendre un instrument de musique qu’on avait abandonné parce qu’on n’avait pas eu le temps. Mais ça peut être aussi écrire. Le but, ce n’est pas d’être un héros en musique ou en écriture… Mais de retrouver et enrichir une des aspirations qu’on avait depuis longtemps et qu’on avait envie de redévelopper. »
Juliette Arnaud conclue : « Quand je sens que je vacille, je me lève juste très tôt, je mets une paire de baskets et où que je sois, je cherche l’endroit où je vais pouvoir voir l’aube arriver. Ça ne coûte pas cher et franchement, ça relève intérieurement, spirituellement. »
Avec :
- Hervé Anseaume, journaliste, écrivain, Guide de survie de la cinquantaine (avec Marie-Pascale Anseaume, Éditions Leduc, 2017, rééd. 2020) ; Guide de survie des jeunes grands-parents (avec Marie-Pascale Anseaume et Marie Thuillier, Éditions Leduc, 2015, rééd. 2021).
- Nicole Prieur, philosophe, essayiste et thérapeute spécialisée dans les relations familiales. Elle fait partie du comité scientifique des colloques du Centre d’Etudes Cliniques de Communications Familiales (CECCOF). Les Trahisons nécessaires : S’autoriser à être soi (Robert Laffont, 2021) ; Grandir avec ses enfants (Marabout, 2002) ; et Petits règlements de comptes en famille (Albin Michel, 2009).
- Juliette Arnaud comédienne, autrice (Comment t’écrire adieu, Belfond, 2018 ; Maintenant, comme avant, Belfond, 2019). Co-anime quotidiennement aux côtés de Charline Vanhoenacker C’est encore nous, sur France Inter.
- Eva Roque journaliste. chaque jour dans le 5-7 de France Inter avec ses Capture d’écrans, chaque semaine dans C l’hebdo sur France 5 d’Ali Baddou
- Françoise Millet Bartoli psychiatre, psychothérapeute. La Crise du milieu de la vie : Une deuxième chance (Odile Jacob, 2002).